Déçue, très déçue par ce film dont j’attendais trop sans doute. On m’avait vendu un film étonnant de poésie, une musique exceptionnelle, une histoire extraordinaire, aussi émouvante qu’instructive…Au final, j’ai vu un film bancal qui ne sait jamais se positionner entre les deux genres avec lesquels il flirte : le documentaire, et la fiction avec une vision onirique de la vie d’animaux pas comme les autres. A trop vouloir ménager la chèvre et le chou, le réalisateur se perd et noie son sujet. A vouloir « faire » du poétique à tout prix Luc Jacquet frôle le ridicule et l’atteint lorsqu’il affuble trois manchots des voix de Romane Borhinger (voix qu’on ne peut pas ne pas reconnaître dès le premier mot et que la comédienne par ailleurs talentueuse, nous sert avec une emphase si inappropriée qu’on est gêné pour elle), et les voix de Charles Berling ( accoutumé à ce genre d’exercice périlleux puisqu’il est le conteur très agréable de « l’Odyssée de l’espèce » ) et de Jules Sitruck qui sont sans doute plus supportables. On pourrait presque accepter ce postulat qui consiste à « humaniser » les manchots empereurs si l’on ne servait pas à ces pauvres bêtes déjà peu gâtées par la vie, un texte indigent, ridicule, qui tentant vainement de se faire poétique et lyrique, ne parvient qu’à se décrédibiliser et à souligner son inutilité et sa présence préjudiciable à l’œuvre.
Quelques aspects de la forme sont donc facilement critiquables. Mais le sujet est tellement original et traité avec une telle tendresse, que l’on ne peut ne pas rester insensible à l’histoire que l’on nous raconte : la vie de ces drôle d’oiseaux qui tient plus du purgatoire que de la promenade de santé. A cet égard, l’on ne peut que reconnaître le talent de Luc Jacquet qui filme divinement les tempêtes de glace, les aurores boréales et l’étrange ballet que dansent les manchots dans un but unique : donner la vie dans un monde qui met tout en œuvre pour l’empêcher d’éclore.